La FTQ manifeste devant les bureaux de François Legault
2020/10/28 – La FTQ manifeste devant les bureaux de François Legault
Les négociations pour une nouvelle convention collective seraient dans «une impasse»
AJOUT DE TROIS JOURNÉES PÉDAGOGIQUES: ÉPUISÉ, LE PERSONNEL DE SOUTIEN SCOLAIRE EXIGE DU RÉPIT, DE L’ÉCOUTE ET DE LA RECONNAISSANCE
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AJOUT DE TROIS JOURNÉES PÉDAGOGIQUES: ÉPUISÉ, LE PERSONNEL DE SOUTIEN SCOLAIRE EXIGE DU RÉPIT, DE L’ÉCOUTE ET DE LA RECONNAISSANCE
30 octobre 2020
Les employés et employées de soutien scolaire membres de la FTQ réagissent avec colère et découragement à l’ajout de trois journées pédagogiques annoncé par le ministre de l’Éducation mardi dernier. Alors qu’ils sont épuisés par les nombreux bouleversements de la pandémie, notamment dans les services de garde, on alourdit ainsi leur tâche, par surprise et sans consultation. Une fois de plus, les employés et employées de soutien des écoles sont laissés dans l’ombre par le gouvernement Legault.
En effet, l’ajout de ces trois journées voudrait dire que les services de garde seraient ouverts toute la journée et sans frais. Leur personnel devrait donc prendre en charge une grande partie des élèves normalement en classe.
Ils réclament donc une rencontre d’urgence entre leurs représentants de la FTQ et le ministre pour trouver des solutions.
«Accorder du répit aux enseignants, c’est très bien, mais le faire en surchargeant du personnel déjà à bout, quelle erreur! Il n’est pas trop tard pour bien faire, il faut convertir ces trois journées en moment de préparation et planification également pour ces membres du personnel, qui en ont cruellement manqué depuis le début de la pandémie», a déclaré le vice-président du SCFP-Québec responsable du secteur de l’Éducation, Guillaume Bégin.
«Nous étions déjà en première ligne au printemps dans les services de garde d’urgence sans les équipements de protection individuelle adéquats. Encore aujourd’hui, les équipements sont excessivement rationnés par endroit. De tout le personnel essentiel, nous sommes parmi les seuls à n’avoir touché aucune prime au printemps, alors que même le personnel des supermarchés en a touché et que nous rendions possibles les services de garde d’urgence. Ça en dit long sur notre dévalorisation chronique», selon la présidente du Conseil national du soutien scolaire (CNSS) du SEPB-Québec, Marie-Claude Éthier.
«Hier, le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, sans doute pour tenter de réparer le pot qu’il venait de casser, nous a adressé des remerciements sur Twitter et s’est dit ouvert à la discussion. Nous nous attendons donc à des pourparlers rapides et constructifs pour concrétiser ces bonnes intentions. Il faudra aussi voir au-delà des services de garde et venir en aide aux autres employés de soutien, dont plusieurs vivent une grande détresse», de réclamer le président du Syndicat des employés de soutien de la Commission scolaire Central Québec (UES 800), Pierre-Paul Binet.
La FTQ, la plus grande centrale syndicale au Québec, représente plus de 600 000 travailleurs et travailleuses.
Les travailleuses et travailleurs du secteur de l’éducation de la FTQ sont représentés par le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), le Syndicat des employées et employés professionnels-les et de bureau (SEPB) et l’Union des employés et employées de service, section locale 800 (UES 800).
Services de garde scolaires: « On est fatiguées, mais on ne pense pas à nous »
PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE – Maryse Bolduc, éducatrice en service de garde dans une école primaire
Des travailleuses des services de garde des écoles de la province digèrent mal les trois journées pédagogiques supplémentaires accordées aux enseignantes par Québec. Comme d’autres dans le milieu de l’éducation, elles se disent fatiguées et se demandent si le gouvernement n’a pas oublié l’ampleur des services qu’elles rendent depuis le début de la pandémie.
Qu’est-ce que trois journées pédagogiques de plus dans une année scolaire ? Pour certaines, c’est la goutte qui fait déborder le vase.
« Ça m’a fait sortir de mes gonds, dit Maryse Bolduc, éducatrice en service de garde dans une école primaire de Charlesbourg. En pandémie, ce n’est pas l’idée du siècle. On suit des restrictions sanitaires importantes, ce sont des journées qui sont difficiles à gérer. »
Mercredi, Québec a annoncé qu’il y aurait trois nouvelles journées pédagogiques d’ici la fin de l’année, ce qui a eu « l’effet d’une bombe » dans le milieu de la garde scolaire. Car non seulement les services de garde seront ouverts ces trois jours-là, mais ils seront gratuits pour les parents qui désirent y envoyer leurs enfants. Le temps donné aux enseignants débordés par la pandémie retombe ainsi dans la cour de leurs collègues.
Technicienne en service de garde dans une école primaire de la Montérégie, Marie Claude Cormier explique qu’organiser une journée pédagogique, c’est un « casse-tête de gestion ». Ainsi, illustre-t-elle, même si une cinquantaine d’enfants seulement sont présents, il se peut qu’on doive les diviser en 20 bulles. « Tout tourne autour de la pandémie », observe Mme Cormier, qui supervise à son école 12 éducatrices.
« On est toujours aux aguets, en hyper vigilance », abonde Rachel Gagnon, qui travaille en service de garde depuis 26 ans.
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PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE – Rachel Gagnon, technicienne en service de garde dans une école primaire
Dès les premiers jours du confinement, au printemps dernier, rappellent plusieurs éducatrices, elles ont assuré les services de garde d’urgence pour les enfants des travailleurs essentiels. Leur travail a changé. Il faut désinfecter le micro-ondes entre chaque repas d’élèves le midi. Porter l’équipement de protection individuelle. Trouver des jeux où les élèves ne se touchent pas. Se laver les mains chaque fois qu’on passe d’une bulle d’élèves à une autre. Rappeler sans cesse aux enfants qu’ils doivent se tenir loin de certains de leurs amis.
« On est fatiguées, mais on ne pense pas à nous », résume une éducatrice.
« Ce ne sont pas des pions »
Le travail d’éducatrice en milieu scolaire a été dénaturé par la pandémie, explique Sophie Mathieu, sociologue et experte de la politique familiale québécoise. Ces travailleuses se retrouvent à désinfecter des classes et « jouer à la police » plutôt que de faire pour quoi elles ont étudié.
« Ce ne sont pas des pions, ce sont des travailleuses qualifiées. La profession n’est pas valorisée, et voilà qu’on leur annonce comme ça : vous allez faire trois journées pédagogiques, arrangez-vous avec ça », dit la chercheuse postdoctorale. Se pourrait-il que le fait que ce soit un travail occupé en très grande majorité par des femmes le laisse dans l’ombre ? », demande-t-elle.
Si on a salué avec raison les travailleurs de la santé et ceux qui ont assuré le service dans les épiceries ce printemps, on a oublié celles qui s’occupent des enfants et qui font du « travail invisible », déplore Mme Mathieu.
« Personne n’a applaudi les éducatrices. Si les médecins sont au front, c’est parce que leurs enfants sont avec elles. Si le feu ne prend pas plus que ça dans les écoles, on peut dire : chapeau aux enseignants, mais aussi chapeau aux éducatrices », poursuit Sophie Mathieu.
Sur le terrain, la fatigue se fait sentir. La douzaine d’éducatrices que supervise Marie Claude Cormier sont « anxieuses ». « Il y a les masques, les lunettes à porter, il faut faire attention quand on donne une feuille ou un crayon à un enfant. C’est très difficile de rester à deux mètres d’eux, elles ont toujours ça en tête. Mais ce sont des personnes qui ont leur travail à cœur, qui sont d’une grande générosité », dit-elle.
L’équipe de Rachel Gagnon « se donne depuis le 16 mars ». « On essaie d’avoir le moral. Avec l’Halloween, on a un peu plus le cœur à la fête, on s’assure qu’il y a aussi une vie dans l’école. Mais quand on s’arrête 30 secondes pour y penser… c’est un gros, gros changement dans notre routine », dit la technicienne en service de garde.
L’éducatrice Maryse Bolduc voit de son côté des « filles qui parlent de prendre leur retraite », d’autres qui envisagent de démissionner. « Le milieu ne se sent pas valorisé, ne se sent pas important. C’est d’une tristesse… », dit-elle.
Pour Rachel Gagnon, ce qui se passe à l’heure actuelle n’est que la suite de plusieurs années de « manque de reconnaissance » pour son travail. « On est des acteurs importants dans la vie des élèves. On les accueille à 7 h et on leur dit au revoir à 18 h. On a un contact avec les parents. On est des éducatrices, on n’est pas des gardiennes », conclut-elle.